Une torpeur du démon et l’envie de tout contrôler sans jamais pouvoir le faire, c’est toujours comme ça les rêves. Cette atmosphère, chaque fois la même, devrait nous aider à nous rendre compte qu’on rêve. Mais non, on n’y arrive pas… On se donne entièrement, corps et âme et dans des aventures toujours folles.
Je suis quelque part et j’entends quelqu’un, je sais qui est ce quelqu’un et je sais qu’il m’en veut. Pourtant, je n’arrive pas à lui donner un nom et je n’ai aucune idée de ce que je lui ai fait. Les idées dans les rêves, c’est dingue, ça se mélange, tout est possible.
Cette personne qui m’en veut à m’en tuer, je l’entends courir. Mais je ne vois rien, rien. Je cherche, je tourne sur moi-même, j’essaie de tout prévoir en sachant que c’est impossible. J’attends d’abord que les pas s’éloignent mais ça dure, ça dure, le son est toujours aussi fort. Je ne supporte plus… Quelque chose doit se passer.
Dix.
Je change de tactique, je fuis à toutes jambes. Je ne sais pas d’où viennent les pas, peut-être suis-je entrain de courir droit vers mon bourreau. Peut-être rit-il en m’entendant arriver. Je cours vers nulle part dans un brouillard épais, mes pas raisonnent, je sens que je l’aide à me repérer en courant comme ça.
Neuf.
J’arrive devant un mur tellement immense que je n’en vois pas la fin. Je m’approche et m’accroupie au pied de celui-ci. J’arrête de bouger pour essayer de repérer les pas de mon tourmenteur. Silence.
Huit.
Silence total. Est-il trop loin ou très près, tapi comme un animal près à bondir ? Le silence est brouillé par les battements de mon cœur que j’entends pulvériser ma poitrine.
Sept.
Je me relève en essayant de ne pas briser le silence. Je longe ensuite le mur en surveillant les alentours. Le silence est à présent aussi pesant que les pas de tout à l’heure, le sifflement de mes tympans rend l’atmosphère encore plus lourde. Tout ça ne durera pas.
Six.
Un cri affreux. Un cri de souffrance abominable qui dure, dure et ne s’arrête jamais. Je suis immobilisé par la terreur, pas même un tremblement. Je sens chacun de mes muscles se contracter aussi fort qu’il le peut. Cet épouvantable râle de douleur me plonge dans un égarement terrible.
Cinq. Quoi ?
Je reprends lentement mes esprits. Que faut-il faire ? Il me semble à présent qu’on ne m’en veut plus. Je ne suis plus effrayé, peut-être ai-je tord. Ma main droite quitte la paroi froide du mur, je retourne dans la brume. Je vais au dénouement.
Quatre.
Derrière moi, le mur se perd dans la brume.
Trois.
J’avance en marchant, le pas assuré. En face de moi, une forme noire se dessine dans la brume. Une forme humaine, d’un gabarit similaire au mien. Elle avance à la même vitesse que moi, en marchant de la même manière. Je sais qu’il s’agît de cette personne qui m’en voulait et qui à présent semble avoir besoin de moi, je sais que le cri était le sien. Un petit halo bleu entoure cette silhouette.
Deux.
Elle s’arrête à un mètre de moi. Je la regarde et aucun visage n’apparaît, toujours ce noir profond entouré d’un peu de bleu. Elle m’observe de la même manière, comme si c’était moi la chose étrange.
Il me semble que cette chose qui me regarde est d’une importance incroyable. Dans une seconde de lucidité, je réalise qu’en face de moi, c’est moi. Un autre moi ? Une partie de moi ?
Un.
Au moment précis de cette découverte, la forme s’approche encore de moi, s’approche et me traverse lentement. Je sens une chaleur agréable et rassurante m’envahir. Corps et âme. Je me retourne, rien. L’endroit est à présent paisible.
Zéro.
Je me réveille dans un sursaut, sans autre souvenir que cet endroit à la tranquillité retrouvée, quelque chose est arrivé.