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16 décembre 2012 7 16 /12 /décembre /2012 09:52

Qui a le droit de voir la mort s’approcher ? Sa fin, comme un couteau dans le dos, ou en face à face... ou peut-être un je ne sais quoi entre les deux, mais qu’importe s’il n’y a pas de poésie ? Par exemple, cette histoire.

 

Le vieux Louis avait bien plus que l’âge auquel il avait pu imaginer emmener son corps. Il disait « vivre l’instant présent comme un cadeau », c’était faux. Tout au fond, il savait bien que ce n’était pas ce que sa chair lui faisait sentir. Il avait pu tromper son intelligence, mais son corps faisait justice à la vérité. Son corps, cette enclume de douleur et de lassitude qui n’abandonnerait jamais. « Je souffre, mais la vie se bat pour la vie, n’espère pas que j’accepte ma fin » semblaient lui crier sa peau sèche, ses jambes vacillantes, sa respiration sifflante.

 

Un samedi, ou un dimanche peut-être, alors que Louis achevait sa promenade journalière, un souvenir de son épouse lui revint alors qu’il traversait l’unique pont du village, un pont qui l’avait vu tant de fois passer accompagné par cette femme qui avait tout su de lui. Ce souvenir fût l’un de ceux qui en revenant, vous arrachent à la réalité et vous replongent dans un instant passé avec une effroyable exactitude. Louis s’arrêta de marcher, fixant la rambarde du pont où sa mémoire lui faisait voir la silhouette de Claudia. Dans ces quelques secondes, le monde sembla accepter d’oublier le temps qui passait. Sur le seul pont d’un village perdu, les sens d’un vieillard se réveillèrent, aiguisés par la mémoire d’une vie qui s’était un jour trouvée là. A la vue de cette épaisse chevelure brune que le vent faisait ondoyer, il lui sembla sentir son odeur enchanteresse. En songe, Il se vit approcher ce corps, passer une main dans cette tignasse brune, révélant une épaule sur laquelle ses lèvres allaient se poser.

 

Tout comme il avait surgi, ce souvenir se dissipa en un instant, et Claudia disparu une fois de plus. En sortant de sa fascination, Louis eu la sensation que ce souvenir aurait dû être le dernier. Cette ombre appuyée sur la rambarde de ce petit pont quelques secondes plus tôt, cette femme qui s’était promenée dans la plus glorieuse allée de se vie, aurait dû l’emmener avec elle.

 

Quelque part, dans un village dont le nom m’échappe, un vieil homme continua sa promenade après une petite pause. 

 

« Si les choses nous emportaient en même temps qu'elles, si mal foutues qu'on les trouve, on mourrait de poésie. Ca serait commode dans un sens » Louis-Ferdinand Céline

 

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